A Roubaix, les candidats courtisent l’électorat musulman avec prudence

Mardi soir, les trois principaux candidats ont accepté l’invitation des représentants musulmans de la ville : 1h30 de débat autour de leur vision de l’islam. Dans une commune qui compte près de 40% de musulmans, le rendez-vous a son importance, surtout à 5 jours du premier tour. Au menu, quelques annonces, pas mal de sourires… et beaucoup de prudence.


Ce soir, ils sont venus pour séduire. Slimane Tir (Verts), René Vandierendonck (maire PS), et Max-André Pick (UMP), doivent débattre de l’islam devant les représentants de la communauté musulmane à l’école Albert Camus.

Quelques minutes avant le début, alors qu’on aligne fébrilement les chaises dans la salle de la cantine, l’un des organisateurs, Rachid Gacem, n’y va pas par quatre chemins. « Je suis à la Star Académie ce soir : les candidats vont essayer de me convaincre, et je voterai pour le meilleur ! »
La salle pourra les interpeller par écrit, les questions étant lues par un médiateur.

Coincés entre exigence électorale et respect de la laïcité, les trois politiques jouent les équilibristes, très en verve sur les sujets consensuels, plus réservés sur les débats qui fachent.

« Etes-vous pour la mise en place de panneaux indiquant clairement l’emplacement des 6 mosquées de la ville ? » demande le médiateur. Slimane Tir se dit « surpris que ce ne soit pas déjà fait ». « Monsieur Tir est vice-président de la communauté urbaine, rappelle Vandierendonck, sourire en coin. Il aurait pu le faire en 2001 ! » La salle apprécie.

Ce qu’ils pensent des délits de faciès ? « Une honte » affirme Pick. Vandierendonck et Tir parlent « égalité » et « compréhension des peuples » avec véhémence.

« Un cimetière musulman à Roubaix »

Plus délicate est la question d’un éventuel centre culturel musulman. « C’est une idée intéressante », lâche Slimane Tir.

Des abattoirs pour les sacrifices de l’Aïd ? « La question doit se poser, mais à la préfecture », déclare le candidat Vert, tandis que l’élu PS admet qu’il y a là « quelque chose à regarder ».

Pour la mise en place de repas « hallal » dans les cantines, les dissensions éclatent : « C’est strictement interdit par la loi », affirme Vandierendonck. Pick évoque l’idée d’un « menu végérarien optionnel » pour arranger tout le monde. Murmure de désapprobation dans la salle.

En fait, l’annonce la plus audacieuse vient du candidat UMP, qui déclare vouloir créer « un cimetière entièrement réservé aux musulmans à Roubaix ». « C’est illégal !» affirme le maire PS.
« Alors les maires de Reims et Grenoble sont dans l’illégalité », réplique Max-André Pick. Avant de se raviser : « Il faudrait au moins étendre le carré reservé aux musulmans.»
Tendre la main, oui. Mais en prenant des gants sur les questions épineuses.

Cyprien Boganda